jade

Impossible d’établir un focus sur 6 Pieds sous Terre sans aborder la revue Jade. A l’instar de Lapin ou de Ferraille illustré, Jade fut créé par nécessité et non dans un but lucratif. A une époque (début des années 90) où la presse BD se réduisait à peau de chagrin, une nouvelle génération d’auteurs indépendants n’ont eu d’autre choix que de lancer leur propre revue pour diffuser leurs bandes et celles de leurs camarades.

Petit rappel historique : « D’abord sous la forme d’un fanzine de cultures alternatives (BD, Bruits, B-movies…), 64 pages, distribué dans des librairies spécialisées et dans les kiosques du sud-ouest, de 1991 à 1995, elle fut consacrée par des prix dans sa catégorie au festival d’Angoulême (1992) et au festival d’Audincourt (1994). 10 numéros furent publiés. De 1995 à 2003, une nouvelle mouture comprenant 26 numéros fut disponible dans tous les kiosques et dans des librairies spécialisées en France, Belgique et Suisse. Ce fut la principale revue qui accompagnât et se fit l’écho des nouvelles tendances de la bande dessinée des années 90. Des auteurs comme Bouzard, Winshluss, Colonel Moutarde, Cizo, Witko, Vanoli, Ambre, Kaze Dolemite, Baladi, Blanquet, Matthias Lehmann, Tirabosco, Jampur Fraize, Monsieur Vandermeulen etc. y aiguisèrent leurs crayons et gagnèrent leur public. Cette troisième version [sortie en 2006], disponible uniquement en librairies spécialisées, entend donner la parole à ces mêmes auteurs ainsi qu’à de nouveaux et jeunes auteurs, directement influencés par cette génération. »  (source)

Pour ceux qui se demanderaient d’où sort la numérotation plutôt bizarre de cette troisième version, chaque numéro porte en fait la référence de la couleur choisie sur la gamme Pantone U pour la couverture. Alors bien sur, cette version U n’a plus rien à voir avec le Jade des années fin 90-début 2000 que l’on trouvait en kiosque. Outre le changement de format (clin d’œil à la collection 16×22 de Dargaud) et de pagination, l’actuel Jade est uniquement centrée sur la bande dessinée. On y retrouve cependant cette même volonté d’explorer et rendre compte des tendances actuelles. Comme le précise le rédacteur en chef Jean-Philippe Garçon, Jade U est « …un espace d’expression qui peut intéresser des tas de gens, des gens avec qui on ne peut pas nécessairement faire un livre de but en blanc, et donc pouvoir proposer une revue, c’est toujours un bon terrain pour voir comment les collaborations se font, et que les gens puissent gagner en expérience aussi avec un tel support. De fait, relancer Jade est vraiment parti de ce constat… » Voilà qui donne du sens. C’est à partir du numéro 630U (de juin 2008), que Jade évolue vers une quatrième version (qui conserve le format et la fréquence), avec une ligne graphique entièrement repensée par Boris Mirroir et l’apparition d’une thématique unique liée à la bande dessinée.

Il est marrant de constater que David et moi avons découvert Jade U quasiment de la même manière, au hasard des rayons d’une librairie, sans en connaître l’existence au préalable. Nous avons de suite apprécié cet équilibre parfait entre analyses sérieuses et humour décalé. « Loin des formes convenues des magazines généralistes avec toujours les mêmes focus sur les mêmes auteurs et/ou les mêmes sujets, nous sommes ici dans la réflexion thématique, dans l’échange, dans le débat, dans les coups de gueule. » (David)

Le fait d’y retrouver des auteurs (Guerse & Pichelin, Bouzard, Besseron, Cizo, Witko, Winshluss…) déjà vus ailleurs (dans Lapin, Ferraille, Psikopat, Fluide…) m’a fait d’autant plus apprécier cette « revue de la bande dessinée moderne ». J’aime bien cette idée de « famille » que l’on peut retrouver dans (et entre) certaines revues. Comme par exemple l’équipe de Fluide Glacial qui possède un esprit particulier qu’elle partage avec celui du Psikopat ou de Charlie HebdoJade a assurément des gênes communs avec Lapin et Ferraille.

Le numéro de janvier 2015, consacré à la légitimité de la bande dessinée, est le dernier de la série des Jade U. Un thème qui clôt la boucle. « Nous mettons cependant un terme, aujourd’hui, à la série U de Jade, dans un paysage où la presse liée à la bande dessinée a retrouvé un important dynamisme. Ce sera pour mieux revenir, bientôt, avec une 5ème mutation de la revue, toujours différente, toujours exploratrice des tendances de son temps. » (Jean-Philippe Garçon)

Jade U va nous manquer. Nous attendons la suite avec impatience.

Mitchul

Une réponse "

  1. […] Poulpe, Le – tome 9 : Le vrai con maltais (Marcus Malte & Jampur Fraize), 2002 – Revue Jade (Collectif), fanzine – Rorschach (Terreur graphique), 2011 – Same Difference (Derek […]

  2. […] actif de la Revue Jade, découvert dans « … à la folie » puis plus récemment dans les numéros de « La Revue […]

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